Dans une interview qu’il accordée à l’AIP, le 27 juillet 2024, le président de la Coopérative des commerçants de bétail de la région des Lagunes, Toé Seydou, appelle à l’union de tous les acteurs de la filière bétail-viande pour la mise en œuvre d’une interprofession consolidée au cours d’une assemblée générale constitutive prévue au plus tard le 15 août 2024.
Comment se porte la filière bétail-viande en Côte d’Ivoire ?
La filière bétail-viande se porte plutôt bien au niveau des acteurs et des marchands. Nous poursuivons nos activités comme prévu, cependant, nous rencontrons quelques difficultés au niveau des faîtières. Ces problèmes devraient trouver une solution avec la mise en place de l’interprofession. Nous avons récemment tenu une réunion à Bouaké pour réfléchir à la structure de cette faîtière.
Nous remarquons diverses prises de position entre les acteurs concernant la mise en œuvre de l’interprofession. Comment cette mise en œuvre peut-elle être possible ?
Il est essentiel que nous abordions la création de l’interprofession dans un esprit d’union et de collaboration, afin de consolider les acquis et d’atteindre les objectifs fixés par notre tutelle. Nous avons un intérêt manifeste à établir l’interprofession. Une tentative de mise en place avait échoué l’année dernière en raison de plaintes d’un autre groupe, ce qui avait conduit à l’annulation du processus. Cette fois-ci, le ministère (des Ressources animales et halieutiques, ndlr) a décidé de jouer le rôle d’arbitre. Nous devons, en tant qu’acteurs, tout mettre en œuvre pour que cette mise en place soit effective. Un comité ad hoc a été constitué pour mener ce processus, et je demande à ce comité de rencontrer tous les acteurs pour trouver un consensus en vue de la création de l’interprofession. Cette structure visera à organiser et formaliser le secteur sans empêcher personne de poursuivre son activité. À la base, ce sont les sociétés coopératives qui seront chargées de la gestion. Beaucoup n’ont pas encore compris le véritable rôle de cette structure. L’État ne peut pas négocier avec chaque acteur individuellement ; il a besoin d’un interlocuteur unique. Certains pensent qu’ils ne pourront pas exercer s’ils ne dirigent pas l’interprofession, ce qui est erroné.
Quelle est l’importance de l’interprofession dans la professionnalisation de la filière bétail-viande ?
Nous opérons principalement dans l’informel, et sans unité, l’État ne pourra pas nous soutenir efficacement. Si nous ne sommes pas unis, même celui qui sera à la tête de l’interprofession aura des difficultés à exercer et à mettre en œuvre son programme d’activités. Diverses interprofessions rencontrent des difficultés, comme l’interprofession cola, qui peine à fonctionner correctement en raison de divergences internes. La véritable question est de comprendre l’apport de l’interprofession pour les acteurs et comment elle peut dynamiser l’élevage en Côte d’Ivoire. Il est crucial de sensibiliser les jeunes à l’importance de l’élevage pour les intégrer pleinement dans cette filière.
Comment l’interprofession pourrait-elle contribuer à la lutte contre le chômage des jeunes ?
L’interprofession pourra jouer un rôle important dans la résolution de nombreux problèmes. En France et dans d’autres pays européens, les jeunes diplômés reçoivent un soutien direct de l’État pour leur installation. Actuellement, de nombreux jeunes formés à Bingerville souhaitent intégrer la fonction publique faute de soutien. Avec l’interprofession, ces jeunes bénéficieront de formations et de subventions, offrant ainsi une opportunité significative pour ceux qui souhaitent se lancer dans l’élevage.
Quel appel lancez-vous aux acteurs pour les amener à s’unir autour de l’interprofession ?
En principe, le ministère des Ressources animales et halieutiques devrait nous permettre d’organiser nous-mêmes notre interprofession. Cependant, les divisions et mésententes sont telles que le ministère doit encadrer le processus. Je demande au ministère de continuer à jouer le rôle d’arbitre jusqu’à la fin du processus. Il est essentiel que le ministre et ses collaborateurs s’impliquent activement pour la mise en place effective de l’interprofession. Certains pensent qu’ils ne peuvent contribuer que s’ils dirigent l’interprofession, ce qui n’est pas le cas ; il faut un leader et les autres doivent le soutenir. Je tiens également à remercier le ministre Sidi Tiemoko Touré pour avoir repoussé la date de l’assemblée générale au 15 août 2024, ce qui nous permettra de mettre en place une interprofession solide et consolidée.
Récemment, vous avez eu un différend avec le district d’Abidjan concernant vos conditions de travail. Quelle est la situation aujourd’hui ? Vos relations sont-elles rétablies ?
Nous présentons nos excuses au gouvernement et au ministre-gouverneur (Ibrahima Cissé-Bacongo, ndlr) pour cet incident. Après plus de 35 ans dans ce métier de marchand de bétail, j’ai toujours eu une bonne collaboration avec l’administration. Cet incident malheureux est dû à un manque de compréhension et ne reflète pas notre manière habituelle de travailler. Nous souhaitons soutenir le ministre gouverneur Cissé Ibrahima Bacongo dans la réalisation du projet du nouvel Abattoir international d’Anyama. Nous accompagnerons également le développement du marché des petits ruminants à Adjamé, ainsi que du marché des bœufs et de l’abattoir.
Comment envisagez-vous votre nouveau cadre de coopération avec le district ?
Un cadre de coopération a toujours existé entre le district d’Abidjan et les acteurs. Il est primordial de maintenir un dialogue continu avec les acteurs pour résoudre les problèmes et avancer ensemble.
Quels conseils donneriez-vous pour atteindre l’autosuffisance en matière de viande ?
Nous devons mettre l’accent sur la production nationale et encourager l’installation des jeunes dans ce secteur. Le ministre des Ressources animales et halieutiques soutient cette dynamique. Il est important de promouvoir l’élevage localement et de créer des zones spécialisées dédiées à l’élevage avec les infrastructures nécessaires.
Certaines personnes affirment que les Ivoiriens ne s’intéressent pas à l’élevage. Qu’en est-il réellement ?
Il est faux de dire que les Ivoiriens ne s’intéressent pas à l’élevage. Environ 15 % de la population ivoirienne est impliquée dans l’élevage et la commercialisation de la viande. Le secteur de l’élevage est essentiel pour nourrir la population et mérite d’être valorisé. Ceux qui souhaitent se lancer dans l’élevage doivent être prêts à investir du temps et des efforts. Avec l’aide de l’État et l’implication des jeunes, nous pouvons révolutionner ce secteur. Actuellement, la production nationale représente entre 18 % et 30 %. Il est crucial de stimuler cette production nationale.
Quel bilan faites-vous de la récente foire commerciale de la Tabaski ?
La Foire de la Tabaski s’est bien déroulée malgré les craintes, nous avons pu fournir environ 80 000 moutons et 19 000 bœufs à Abidjan, avec peu de retours.
Source : Autre presse